Ibuprofène, kétoprofène : pourquoi ne pas les prendre en cas d’infection?

By 9 janvier 2024 janvier 11th, 2024 Articles médicaux
Ibuprofène, kétoprofène pourquoi ne pas les prendre en cas d’infection -photo

Maux de tête, signes de rhume, douleurs… Le premier réflexe en cas de symptômes légers et occasionnels est de sortir la boîte d’anti-inflammatoires de l’armoire à pharmacie. Mais attention, les AINS comme l’ibuprofène ne doivent pas être pris en cas d’infection. On vous explique pourquoi.

Les Anti-inflammatoires Non Stéroïdiens (AINS), disponibles sans ordonnance, comme l’ibuprofène, sont largement utilisés en cas de douleurs et de fièvre, sans avis médical.

C’est aussi le cas du kétoprofène, qui est aussi un AINS dérivé de l’ibuprofène, mais uniquement disponible sur ordonnance.

Néanmoins, ces médicaments ont une action antalgique et antipyrétique limitée. Le bien-être qu’ils peuvent procurer sur l’instant est dû à leur action anti-inflammatoire mais ils présentent des risques de complications parfois graves.

“En résumé, l’ibuprofène agit en modulant la cascade inflammatoire au niveau moléculaire en inhibant les enzymes COX-1 et COX-2. Cette modulation contribue à atténuer la réponse inflammatoire, soulageant ainsi la douleur et réduisant les symptômes associés à l’inflammation.”

Samuel Ouaknine, docteur en pharmacie.

Anti-inflammatoires et infections : un risque complications parfois graves

C’est ce qu’a décrit l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) en 2020 dans son alerte (source 1). Elle dénonce des cas de complications infectieuses graves par la prise de ces médicaments sur de courtes durées (quelques jours) dans des contextes banals de douleurs ou de fièvre chez des personnes en bonne santé.

Sur l’ensemble des cas rapportés depuis l’année 2000, 337 cas de complications infectieuses avec l’ibuprofène et 49 cas avec le kétoprofène ont été retenus. Notons que seuls les cas déclarés à l’ANSM sont comptabilisés.

La plupart des malades ont été admis aux urgences pour des pathologies graves :

  • d’infections sévères de la peau et des tissus mous (dermohypodermites, fasciites nécrosantes,…) ;
  • de septicémie ;
  •  d’infections pleuro-pulmonaires (pneumonies compliquées d’abcès, pleurésie) ;
  • d’infections neurologiques (emphysèmes, abcès cérébraux,…) ;
  • d’infections ORL compliquées (cellulites, médiastinites,…)

Dans la majorité des cas, ces complications ont été responsables de séquelles voire de décès.

“Il existe des préoccupations théoriques selon lesquelles l’ibuprofène, en tant qu’anti-inflammatoire, pourrait atténuer la réponse immunitaire naturelle du corps à une infection virale. Cependant, les preuves définitives à cet égard sont limitées et dépendent du contexte de chaque infection virale spécifique.”

Samuel Ouaknine, docteur en pharmacie.

L’ANSM a réitéré son appel à la vigilance (source 1 et 3) : d’abord  en 2020, lors du contexte de la covid-19 déconseillant le recours aux AINS en cas de symptômes d’infection au SARS-CoV-2. Et par la suite, en mars 2023 alors que de nouveaux cas avaient été rapportés.

“Cependant, à ce jour la plupart des autorités sanitaires dont l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) n’émettent pas d’avertissements spécifiques contre l’utilisation de l’ibuprofène chez les personnes atteintes de la covid-19”, selon le pharmacien. Dans tous les cas, mieux vaut limiter les risques  et demander conseil à son médecin.

AINS (ibuprofène, kétoprofène) : quelles indications ?

Les AINS comme l’ibuprofène (Nurofen®, Spedifen®…) et le kétoprofène sont des médicaments qui ont des propriétés anti-inflammatoires, antalgiques (anti-douleur), antipyrétiques (réduisent la fièvre) et anti-agrégants plaquettaires (fluidifiant le sang).

Ils sont surtout indiqués en cas de douleur d’origine inflammatoire, en dehors de tout contexte d’infection. Ils peuvent venir soulager :

  • des douleurs légères à modérées : maux de tête (migraines, céphalées de tension),  courbatures…
  • des douleurs rhumatologiques : arthrose, rhumatismes (polyarthrite rhumatoïde, spondylarthrite ankylosante…), lombalgies
  • des douleurs traumatologiques : entorses, foulures, tendinites… ;
  • des douleurs gynécologiques, lors de règles douloureuses.

Dans tous les cas, les AINS doivent être utilisés sur de courtes durées (3 jours) et de préférence sur avis médical.

 

 Attention les AINS sont contre-indiqués chez :

  • la femme enceinte de plus de 6 mois ou la femme allaitante ;
  • les enfants de moins de 15 ans ;
  • les personnes âgées ;
  • les personnes souffrant de certaines maladies chroniques (insuffisance rénale…)
  • les personnes qui ont un ulcère gastrique

 

“ Des complications intestinales ont été rapportées comme des irritations de l’estomac et des ulcères. Les infections virales, en particulier celles affectant les voies respiratoires, peuvent déjà causer des symptômes gastro-intestinaux, et l’utilisation d’ibuprofène pourrait potentiellement aggraver ces symptômes.”

 Samuel Ouaknine, docteur en pharmacie

  • les personnes qui ont la varicelle (risque de complications cutanées graves).
  • les personnes qui prennent certains traitements (anticoagulants, lithium…).

 

En cas d’infection, privilégier le paracétamol

Le paracétamol est un antalgique de premier niveau qui suffit à atténuer ou supprimer la douleur dans la majorité des situations courantes. Il entraîne moins d’effets secondaires que les AINS et à la différence de beaucoup d’entre eux, il peut être pris pendant la grossesse et l’allaitement.

  • La posologie du paracétamol chez l’adulte et l’adolescent de plus de 15 ans est 1 gramme par prise et pas plus de 3 fois par jour (maximum 3 grammes par jour).
  • La posologie du paracétamol chez les bébés ou les enfants dépend du poids de l’enfant. On recommande de donner la dose de 15mg/kg par prise. Il est recommandé de ne jamais dépasser la dose de 500 mg par prise chez l’enfant de moins de 15 ans.Le délai à respecter entre 2 prises est de minimum 6 heures, il ne faut donc pas administrer le paracétamol plus de 4 fois par jour.

Pour plus d’efficacité contre la douleur et la fièvre, peut-on associer un AINS et du paracétamol ou deux AINS ?

Non, il ne faut pas associer les AINS et le paracétamol. De la même façon qu’il ne faut jamais associer deux AINS.Si la douleur ou la fièvre persistent mieux vaut consulter un médecin afin qu’il recherche la cause de la douleur et qu’il prescrive si nécessaire, des traitements antibiotiques ou d’autres antalgiques (acupan, codéïne, tramadol, etc).

 

 

Entretien avec Samuel Ouaknine, docteur en pharmacie

Source 1 : Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et complications infectieuses graves

Source 2 : Anti-inflammatoires non stéroïdiens et COVID-19 Expertise de pharmacovigilance – ANSM

 

 

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